Copa America et Euro : pause réflexions

Michael Bradley vs. Lionel Messi - USA vs. Argentina - CAC

Journée de sevrage aujourd’hui : depuis très exactement trois semaines, c’est la première fois qu’il n’y a ni match de Copa America ni match de l’Euro à se mettre sous la dent. Oui, le sevrage est difficile. On y pense sans arrêt, à ces grandes compétitions, et on aime ça, ça fait du bien. Alors, pour alimenter les débats, voici toute une série de réflexions sur les deux grands championnats continentaux en cours en ce moment.


COPA AMERICA

Argentine - Chili : la finale opposera deux équipes au-dessus du lot. La première a gagné ses cinq rencontres, dont quatre par au moins trois buts d’écart. Le second, après une défaite initiale contre l’Argentine, s’est montré supérieur à tous ses concurrents, donnant une raclée au Mexique avant de rapidement mettre fin au suspense en demi-finale contre la Colombie, équipe la plus séduisante du tournoi quand on exclut les deux finalistes. Et si le Chili visait bientôt la première place du classement Fifa ?


La fin de Messi le maudit ? Le joueur du Barça est à 90 minutes (auxquelles il faudra peut-être rajouter une séance de tirs au but) d’enfin remporter un premier grand trophée avec son équipe nationale. Mais surtout, il a contribué activement à cette place en finale avec, entre autres, un triplé contre le Panama et un superbe coup franc face aux États-Unis. Le débat « Messi décevant en équipe nationale Â» semble avoir pris fin en Argentine.


Quel est le véritable niveau des États-Unis ? Certains diront : figurer parmi le top 4 du continent américain au complet, et aller plus loin que le Mexique, l’Uruguay ou le Brésil, c’est très fort ! D’autres pointeront la leçon reçue par l’Argentine lors d’une finale perdue 4-0 sans le moindre tir américain. La vérité est sans doute quelque part entre les deux. Avec ou sans Klinsmann.


Des claques pour la Concacaf. En quelques jours, ses deux équipes phares ont pris un 11-0 face à des représentants de la Conmebol, avec la victoire 7-0 du Chili face au Mexique et celle 4-0 des Argentins contre les États-Unis. Malgré sa victoire contre une Colombie déjà qualifiée, le Costa Rica est passé à côté de son tournoi. La Jamaïque n’a pas marqué, Haïti a fait de son mieux (et marqué contre le Brésil, provoquant des scènes de liesse malgré le résultat), et le Panama était dans un groupe trop relevé comprenant les deux futurs finalistes.


Deux agréables surprises. En franchissant le premier tour, provoquant au passage les éliminations du Brésil et de l’Uruguay, le Pérou et le Venezuela ont déjoué tous les pronostics. Leurs supporters veulent maintenant confirmation lors des éliminatoires de la Coupe du monde 2018 !


Indigestion de Chili pour le Mexique. Sept buts dans les dents, « Ã§a ne représente pas l’écart entre les deux équipes Â», dixit Carlos Osori, sélectionneur du Mexique, qui faisait partie des favoris de la compétition. Cela ne l’a pas empêché de présenter ses excuses à la nation et de parler de honte pour qualifier la prestation de son équipe. Au moins, elle a franchi le premier tour, pas comme l’Uruguay…


Joga Malito. Tête de série du groupe théoriquement le plus facile, le Brésil n’a même pas réussi à en sortir. Deux ans après l’humiliation contre l’Allemagne lors de la Coupe du monde, ça fait tache ! Le sélectionneur Dunga (qui, selon certains, n’aurait jamais dû être rappelé tant il prône un jeu à mille lieues de la culture brésilienne) a été démis de ses fonctions, et remplacé par Tite, venu de Corinthians avec qui il a remporté la Coupe du monde des clubs 2012.


EURO 2016

Aucune équipe n’a pris neuf points sur neuf. Aucune équipe n’a d’ailleurs dominé son sujet avec aisance lors des trois rencontres. A priori, les trois équipes les plus convaincantes ont été l’Allemagne, la Croatie et l’Italie.


Le « tableau déséquilibré Â», vraiment ? À ce que je sache, il y a autant de premiers de groupe de chaque côté. Le Pays de Galles et la Croatie ont terminé méritoirement devant l’Angleterre et l’Espagne, ils ont donc été meilleurs. Dans cette partie de tableau, il y a aussi la Pologne, qui a tenu tête à l’Allemagne. Pas des noms prestigieux, certes, mais néanmoins de très bonnes équipes à cet Euro.


Avec six buts marqués, la Hongrie et le Pays de Galles possèdent les attaques les plus prolifiques. Les Gallois ont d’ailleurs en leurs rangs le meilleur buteur (Gareth Bale) et le meilleur passeur (Aaron Ramsey) à ce stade de la compétition. Le premier est à égalité avec l’Espagnol Alvaro Morata, le second avec le Belge Eden Hazard. Les Hongrois font partie des huit nations à avoir six joueurs différents impliqués dans leurs buts (but ou passe décisive), les autres étant l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne, la France, l’Italie, la Croatie et l’Islande.


Seules deux équipes n’ont pas encaissé : l’Allemagne et la Pologne. Toutes deux dans le même groupe, elles se sont neutralisées lors de leur confrontation directe. On demande quand même à éprouver la solidité de leur défense face à des adversaires plus coriaces que les faibles Ukraine et Irlande du Nord.


Klose manque à l’Allemagne. La Mannschaft est toujours hyper puissante, capable de mettre en route un rouleau compresseur, mais il lui manque l’homme de pointe parfait. En plus, Müller n’est pas verni par la chance pour le moment. Et pourtant, elle fait peur ! Si elle trouve la bonne formule, elle sera sérieusement candidate à un doublé Coupe du monde - Euro.


Antonio Conte est un génie. Sa science tactique a complètement déboussolé la Belgique lors du premier match. Si la victoire contre la Suède a été acquise en fin de match, l’Italie a quand même maîtrisé son sujet. Et les titulaires étaient au repos contre l’Irlande. De quoi se reposer avant d’affronter… l’Espagne au prochain tour. Zut, il y a eu un bug dans la bouteille et un raté avec les vÅ“ux !


La France se fait peur, mais n’est pas mauvaise pour autant. Oui, elle a attendu les dernières minutes pour être délivrée contre l’Albanie et la Roumanie, deux défenses solides. Elle n’a pas marqué contre la Suisse mais a eu de grosses occasions. Elle a quand même le bénéfice du doute tant qu’elle n’a pas affronté d’adversaire dont les intentions sont un peu plus offensives.


Les néophytes de l’Espagne répondent à l’appel. Auteur de trois buts, Morata est en tête du classement des buteurs et s’il y a moins de tiki taka malgré l’intégration de Fabregas, le Turinois facilite l’adoption par l’équipe d’un jeu collectif plus « traditionnel Â». Même s’il se met moins en valeur, Nolito a les mêmes vertus. Le ressac contre la Croatie coïncide avec le remplacement de ces deux joueurs : ce n’en est pas l’unique raison, mais ce n’y est pas étranger non plus.


La Belgique ne convainc pas ? On « s’en bat les couilles Â» ! Ce n’est pas moi qui le dit, c’est Kevin De Bruyne. Un mauvais match, un bon, un moyen, et une manière pas à la hauteur des grands noms dans l’équipe : certes, mais ceux qui en attendaient du football champagne ont rarement vu une formation plus éloignée, côté spectacle, des Pays-Bas de Van Basten que de l’Allemagne des années 80. Et elle serait bien contente d’être au centre d’une version modernisée de la fameuse déclaration de Gary Lineker.


L’Angleterre reste un mystère. Victorieux contre leurs voisins gallois, jouant avec leur bonheur face à la Russie et timorés contre la Slovaquie, les Anglais devront tourner à plein régime pour venir à bout de l’iceberg islandais, qu’aucun navire n’a réussi à vaincre dans le groupe F. Ils en ont les moyens, mais pour le moment ils n’effrayent pas grand monde.


La Croatie, capable du meilleur comme du pire. Avec ses techniciens au-dessus de la moyenne possédant aussi une grande intelligence de jeu, elle a offert du très beau football lors de ses deux premières rencontres avant de montrer son efficacité en battant l’Espagne. Mais une petite voix susurre qu’elle est capable de se battre toute seule. Sa fin de match contre la Tchéquie illustre bien que son pire ennemi, c’est peut-être elle-même.


330 000 habitants. C’est la population de l’Islande. Et il y fait froid. Ça n’a pas empêché ce pays nordique de se donner les moyens de développer son soccer, et de franchir le premier tour de la compétition. Même si ça ne concurrence pas encore ses handballeurs, parmi les meilleurs au monde. Pays d’un seul sport ? Certainement pas ! Sans compter sur des supporters qui mettent une ambiance formidable. Selon les chiffres, entre 6 et 10% de la population du pays est actuellement en France !


Ronaldo s’en sort mieux qu’Ibrahimovic. Le Portugais n’a pas fini le bec dans l’eau, a marqué contre la Hongrie et aidé son équipe à passer, très difficilement, au tour suivant. Mais le Portugal est capable de se réveiller soudainement… ou de sombrer. Zlatan n’a pas marqué, la Suède doit son seul but à un Irlandais qui a trompé son propre gardien, et l’auto-proclamée légende sort dans une discrétion inhabituelle pour lui qui n’a d’égale que la sportivité de toute l’équipe suédoise, Monsieur Z compris.


À deux ans de la Coupe du monde chez elle, la Russie semble tout sauf prête. L’équipe nationale chère à Vladimir Poutine est passée à côté de son sujet lors de chaque match, et seule la Suède a peut-être été aussi décevante. Les hooligans russes se sont fait tristement remarquer. Le pays va mal économiquement et a été touché par plusieurs scandales dans d’autres sports. À bien y penser, Russie 2018 est une attribution encore moins judicieuse que Qatar 2022.


Non au « Brexit Â» footballistique : l’Angleterre, le Pays de Galles et l’Irlande du Nord, les trois membres du Royaume-Uni, ainsi que leur voisin irlandais ont tous franchi le premier tour. Heureusement que les Écossais sont restés à la maison pour sortir le chien et arroser les plantes.


Bilan moyen pour les joueurs de MLS. Collectivement, c’est bon, puisque la Belgique de Ciman et l’Irlande de Keane ont franchi un tour, alors que l’Albanie de Gashi a été éliminée de peu. Titulaire au premier match, lors duquel il fut très impliqué, le défenseur montréalais a ensuite été remplacé par Thomas Meunier, qui a été excellent. L’attaquant du LA Galaxy a dû se contenter d’un rôle de remplaçant en fin de match, tout comme celui de Colorado qui a disparu de la circulation après avoir raté une occasion grosse comme une maison contre la Suisse.