Soni Mustivar montre l’exemple en bouchant des trous

Kansas City est une des équipes en forme du moment. Comptant actuellement la meilleure moyenne de points par match de toute la MLS, elle tourne à un rythme surprenant tant elle déplore d’absences de joueurs importants. Mais la relève est on ne peut plus prête ! Parmi les découvertes de ces dernières semaines, l’international haïtien Soni Mustivar.


Il est particulièrement tombé dans l’œil de certains collègues de MLSsoccer.com cette semaine. Alors que son équipe est en tête du baromètre hebdomadaire, on y souligne que depuis qu’il est titulaire, le Sporting a pris 20 points sur 27. Quand à Matthew Doyle, il le qualifie carrément de « monstre » en récupération de balle, chiffres impressionnants à l’appui (voir le point 3).


Interrogé sur ce que lui demande l’entraîneur, le principal intéressé ne fait pas de cachotteries, mais répond en toute modestie : « Ma mission est de stabiliser l’entrejeu, de couvrir les espaces dès qu’il y a un trou pour assurer une bonne cohésion. C’est le rôle de tout milieu défensif. »


Avant de boucher les trous sur le terrain, encore fallait-il qu’il y trouve sa place. Transféré alors que la préparation battait déjà son plein, Mustivar a dû rattraper un retard de condition physique et s’habituer au jeu de son nouveau club. Jusqu’au jour où Servando Carrasco a été suspendu, début mai. C’était l’occasion de se montrer… mais il n’était pas considéré comme un bouche-trou. « Avant le match, l’entraîneur m’a dit que même sans ça, il comptait me donner ma chance rapidement. »


Parfois, les circonstances font bien les choses. Peter Vermes ne regrette pas d’avoir offert sa première titularisation à Mustivar puisque depuis lors, il a commencé chaque match. « Il me dit qu’il est satisfait de mes prestations, et particulièrement impressionné par la manière dont je couvre le terrain et récupère le ballon. Mais c’est un perfectionniste, et il trouve toujours des points que je dois améliorer ! Je dois travailler mon positionnement pour l’utilisation du ballon, pour le recevoir et mes choix de passes. »


Cela faisait toutefois un bail que l’entraîneur de Kansas City savait de quoi son joueur était capable. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Mustivar a quitté Ploiesti, club roumain où il jouait depuis trois ans, et traversé l’Atlantique quand son agent lui a fait part de l’intérêt des Ciel et Marine. « Quand je lui ai dit que ça pourrait me plaire, il m’a mis en contact avec Peter Vermes. En parlant avec ce dernier, j’ai compris qu’il me voulait vraiment. Il me connaissait et avait vu plusieurs de mes matchs. Ça m’a fait prendre ma décision. Il m’a aussi dit : “Si tu viens, ce n’est pas pour te la couler douce aux États-Unis, mais pour travailler ! Notre club est ambitieux, nous voulons gagner.” »


Cela a permis à Mustivar de savoir, un peu, à quoi s’attendre. Mais il n’en savait guère plus et a effectué un grand plongeon dans l’inconnu. « Je ne connaissais rien de la MLS avant de venir, sauf les noms des équipes et de certains grands joueurs. Le style est agressif, il n’y a pas beaucoup de temps morts. Chaque équipe a de bonnes individualités et toutes sont plus ou moins du même niveau. Il n’y a pas de gros écarts entre les meilleures et les moins bonnes. Par rapport à l’image qu’on en a en Europe, le niveau est très élevé. Et il y a beaucoup d’engouement du public. Ce n’est pas “le sport que personne ne veut voir” : les Américains aiment le foot ! »


Et Mustivar aime les États-Unis, qu’il découvre aussi. « J’y étais déjà venu une fois, en vacances à Las Vegas… ce qui ne reflète pas vraiment les États-Unis. Après quelques mois ici, je trouve ça génial. J’adore la mentalité, les gens sont sympas et relax. Notamment les supporters. Et puis, pour ce genre d’ambiance détendue, je suis bien tombé dans une ville comme Kansas City. »


Il est aussi bien tombé dans un groupe de joueurs qui l’a vite adopté. « Rapidement, je me suis rendu compte que mes coéquipiers m’avaient intégré dans le groupe. Il n’y a pas eu d’effort particulier à effectuer, tout s’est passé très naturellement : ils sont tous sympas, et ne m’ont pas laissé dans mon coin parce que j’étais nouveau, mais se sont comportés avec moi comme si j’étais là depuis longtemps. »


Il s’y sent tellement bien qu’il ne regrette pas plus que cela de ne pas être de la belle aventure haïtienne à la Gold Cup en ce moment. « À choisir entre être ici ou avec eux, à vrai dire, je ne peux pas dire que j’ai une préférence… Je félicite Haïti, qui a bien joué et que je continue de suivre. Mais en ce moment, je suis bien à Kansas City. »


Ses propos laissent transparaître son bonheur et sa plénitude dans son nouvel environnement. « On travaille bien à l’entraînement, l’ambiance est au top et tout le monde poursuit les mêmes objectifs. Je me sens épanoui dans cette équipe, je prends beaucoup de plaisir à jouer chaque match. Ma saison sera réussie si on gagne un trophée et si mes prestations sont bonnes… mais aussi si celles de l’équipe le sont. Je suis quelqu’un qui valorise beaucoup le collectif : si l’équipe va bien, je vais bien. »


Ce samedi lui offrira peut-être un clin d’œil du destin. Formé dans la région parisienne, Mustivar a joué ses premières minutes chez les grands à Bastia, en D2 française, où il était le coéquipier d’Hassoun Camara, défenseur de Montréal, qui se déplace à Kansas City lors de la prochaine journée. « Je lui ai déjà parlé du match. Il revient de blessure et ce n’est pas sûr qu’il soit du voyage. On s’entendait super bien, c’est un mec génial. Mais l’anecdote à retenir, c’est que pour mon premier match chez les pros, je suis monté au jeu car il s’était blessé après une demi-heure. »


Âgé de 25 ans, Mustivar a déjà connu beaucoup d’aléas dans sa carrière. International avec l’équipe de France des -20 ans, il a vécu des moments difficiles qui ont mis fin à ses rêves de jouer pour les Bleus et lui ont fait prendre la direction de la Roumanie. « J’ai toujours le même agent depuis mes débuts, c’est quelqu’un que je connais depuis que j’ai 12 ou 13 ans. Je ne jouais pas dans mon club en France, et je ne me sentais pas bien. Il m’a proposé d’aller ailleurs. Mais la Roumanie ? J’étais sceptique mais aventurier. Il m’a conseillé d’essayer six mois, j’y suis resté trois ans ! »


Il y a connu plusieurs entraîneurs et a tapé dans l’œil de certains d’entre eux au point de recevoir le brassard de capitaine, malgré son âge et malgré le fait qu’il soit étranger. À cause d’un charisme hors du commun et d’une âme de leader ? « Pas vraiment ! Je ne suis pas une grande gueule dans le vestiaire, mais davantage quelqu’un qui montre l’exemple à suivre en raison de mon attitude et de mon professionnalisme sur le terrain. Mais si tu es respecté pour ça, tu seras forcément aussi davantage écouté dans le vestiaire. »


Nul doute que dans un groupe qui bouge peu et composé de nombreux joueurs établis comme celui de Kansas City, avec les Zusi, Feilhaber et autre Besler, un jeune venu d’ailleurs qui veut gagner le respect ne doit pas commencer par parler fort mais bien par montrer qu’il est un vrai plus pour l’équipe. Avec ses prestations de ces dernières semaines, Mustivar est sur la bonne voie.