Academy

Tous les clubs de MLS devront expliquer leur philosophie et la mettre en œuvre

Tous les clubs de MLS devront expliquer leur philosophie et la mettre en œuvre -

Nous vous expliquions hier que le fonctionnement des clubs de MLS allait ĂŞtre observĂ© en dĂ©tails par une sociĂ©tĂ© externe. VoilĂ  le moment de vous dĂ©voiler ces dĂ©tails. Qu’est-ce qui sera scrutĂ© ? Par qui ? Comment ? Sur quelles bases seront effectuĂ©es les Ă©valuations ? Quels genres de recommandations seront ensuite faites ? Accrochez-vous, ça en vaut la peine !


Pour les clubs, la première Ă©tape consiste Ă  fournir de nombreuses explications thĂ©oriques. Ils ne doivent, cependant, pas la prendre Ă  la lĂ©gère. « Nous commençons par prĂ©parer les clubs, car nous leur demandons beaucoup de documents : ils doivent nous expliquer leur vision, leur philosophie, leurs processus, etc. C’est la première partie de l’évaluation Â», explique Hugo Schoukens, directeur gĂ©nĂ©ral et fondateur de Double Pass, la sociĂ©tĂ© en charge de l’audit.


La deuxième Ă©tape consiste en une sĂ©rie de rencontres avec de nombreux acteurs du club, afin qu’ils expliquent ces concepts, leur mise en application, et leur travail. « Nous allons dans les clubs pour mener des entrevues avec toutes les personnes concernĂ©es : cela va des formateurs de jeunes au prĂ©sident en passant par le directeur gĂ©nĂ©ral, le directeur technique, les entraĂ®neurs, le mĂ©decin, les joueurs et d’autres. Ces entrevues sont standardisĂ©es : nous faisons les mĂŞmes dans tous les clubs. Â»


Troisième Ă©tape : l’observation. Pour voir, finalement, si la thĂ©orie est bien appliquĂ©e dans la pratique. « Elle consiste Ă  vivre sept ou huit jours dans le club, Ă  observer les entraĂ®nements et les matches de diffĂ©rentes catĂ©gories d’âge et de l’équipe première. Ă€ cela s’ajoute de l’analyse vidĂ©o, car nous leur demandons de nous fournir des matches. Â»


Tout cela est ensuite inter-reliĂ©, sur base de plusieurs centaines de critères, tous dĂ»ment rĂ©pertoriĂ©s dans les carnets des observateurs de Double Pass. « Ă€ partir de lĂ , nous effectuons des Ă©valuations formelles et informelles. Nous Ă©valuons si la philosophie est bien implĂ©mentĂ©e. Si le contenu des entraĂ®nements est en rapport avec elle et avec le curriculum fourni. Nous regardons si les matches sont en rapport avec cette philosophie ou avec l’obtention de rĂ©sultats. En tout, il y a de 600 Ă  750 critères qui nous permettent une analyse approfondie. C’est une approche holistique : elle ne concerne pas que le terrain, mais aussi l’éducatif, le social, le mĂ©dical, la stratĂ©gie du club, son organisation, sa manière de prendre les dĂ©cisions, etc. C’est donc très diversifiĂ©. MĂŞme si ce qu’il se passe sur le terrain nous intĂ©resse surtout, il faut tenir compte de tout ce qu’il y a autour. Â»


Le travail est mĂ©thodique. S’il y a plusieurs centaines de critères, tous Ă©margent Ă  des catĂ©gories principales. « Nous avons huit indicateurs du processus, ce sont eux qui doivent dĂ©finir le succès : l’institutionnel (la stratĂ©gie du club, le modèle d’affaires de la formation des jeunes), l’organisation (comment le club est structurĂ© et la position de la formation des jeunes), le recrutement et dĂ©veloppement du talent (tant en Ă©quipe qu’individuel), le support (mĂ©dical, scientifique, social), l’évaluation du staff technique sur base de critères objectifs, l’analyse de la performance du joueur (la manière d’utiliser un système, les tests utilisĂ©s et leurs objectifs), les ressources humaines et la communication (la façon dont les entraĂ®neurs sont recrutĂ©s, gĂ©rĂ©s, motivĂ©s ou formĂ©s), ainsi que les infrastructures (ce qu’on voit, ce qui est le plus facile pour nous). Ă€ cela, il faut ajouter la productivitĂ© (compter le nombre de joueurs devenus professionnels, etc.) qui permet de mesurer la performance. » Si vous en doutiez encore, vous comprenez dĂ©sormais que les clubs de MLS (et certains d’USSDA Ă©galement) vont ĂŞtre examinĂ©s dans leurs moindres recoins. Il n’y aura vraiment pas de place pour l’improvisation et les balbutiements.


En outre, demande particulière de la MLS, chaque Ă©quipe première aura droit Ă  une attention spĂ©cifique. « Pour elles, nous allons surtout examiner la manière de travailler lors d’une semaine normale : ce qui est travaillĂ© techniquement et tactiquement, l’équilibre entre le travail et le repos, et de nombreux autres critères. On comprend aussi très bien qu’il y a une diffĂ©rence avec les jeunes, avec un besoin de succès immĂ©diat contrairement au travail Ă  long terme. Mais il est important de trouver la structure. De quoi part le coach ? De sa vision ? De celle du club ? De rien du tout ? Qui dĂ©finit le style de jeu du club ? Le directeur technique ? L’entraĂ®neur de l’équipe première ? Ce dernier a-t-il une vision ou non ? Si oui, laquelle ? C’est important, car c’est lĂ  que les jeunes doivent aboutir. Â»


En raison de cette demande supplĂ©mentaire, Double Pass a renforcĂ© son Ă©quipe pour travailler dans les clubs de MLS. « De ce fait, nous aurons une Ă©quipe de neuf hommes, une des meilleures que nous avons montĂ©e jusqu’à prĂ©sent, dont trois experts qui ont des rĂ©fĂ©rences avec des Ă©quipes premières : Jean-François De Sart, un ancien joueur professionnel qui a Ă©tĂ© directeur technique du Standard, Jan Versleijen, qui a une renommĂ©e aux Pays-Bas, et Henk Mariman, ancien directeur technique du FC Bruges. Ce sont des experts qui apporteront un regard neuf. Â»


Car tout cela n’est qu’un dĂ©but : des suites sont dĂ©jĂ  prĂ©vues. « En raison des demandes spĂ©cifiques, ils seront trois, poursuit Schoukens. D’habitude, ils ne sont que deux par projet. Mais celui-ci l’exige et le mĂ©rite car nous sommes partenaires. Il ne s’agit pas d’un simple audit après lequel tout s’arrĂŞte. Nous allons entamer un premier cycle, qui va consister Ă  observer et Ă  constater, pour ensuite mettre la barre plus haut afin d’optimiser les centres de formation et les rĂ©fĂ©rences pour chaque Ă©quipe première. Â»


Tout est mis en Ĺ“uvre pour que les trois observateurs au travail dans chaque club tirent les conclusions les plus pertinentes possible. « Ils doivent dĂ©battre de leurs opinions, dĂ©cider ensemble et arriver Ă  un consensus tous les trois. Le jugement ne se fait pas non plus sur une seule base, mais bien sur l’ensemble des documents remis par le club, des entrevues, des entraĂ®nements et des matches. Tout le monde peut Ă©crire qu’il a tel style de jeu... mais il faut aussi savoir l’expliquer lors des entrevues, le travailler Ă  l’entraĂ®nement et l’appliquer en match. Notre façon d’évaluer est donc basĂ©e sur un tout, afin de donner de la crĂ©dibilitĂ© Ă  nos conclusions. Â»


Ă€ la fin du premier cycle, les clubs auront dĂ©jĂ  un retour et pourront en savoir beaucoup plus sur eux-mĂŞmes, et sur le travail Ă  accomplir. « Nous faisons des constats et des recommandations. Elles sont toujours basĂ©es sur les huit catĂ©gories qui dĂ©finissent le succès, en lien avec les 600 Ă  750 critères que nous analysons. Et chacun d’entre eux a encore des sous-critères permettant aux personnes en charge de l’audit de bien tout prendre en compte. Par exemple, le critère du style de jeu est gĂ©nĂ©ral, mais aussi vu pour la dĂ©fense, l’attaque, la contre-attaque, etc. Dans notre rapport, on peut par exemple dire que le rĂ´le de la formation des jeunes n’est pas clair dans un club car certaines personnes tiennent un discours alors que d’autres disent le contraire. On peut se demander si le directeur du centre de formation est consultĂ© avant de recruter Ă  l’extĂ©rieur des joueurs pour l’équipe première. On peut dire que la philosophie n’est pas assez dĂ©taillĂ©e : demander ce qu’on entend quand on parle du style de jeu, si les objectifs pour y arriver sont bien dĂ©finis dans chaque catĂ©gorie d’âge. Cela donne un rapport de huit Ă  dix pages par club. Â»


Le projet est ambitieux. Ă€ vrai dire, il est Ă  la hauteur des ambitions de la MLS et de la FĂ©dĂ©ration amĂ©ricaine. « La vision et la stratĂ©gie de la MLS est d’être un des meilleurs championnats pour 2022. La FĂ©dĂ©ration, elle, veut ĂŞtre une rĂ©fĂ©rence pour 2026. Ils nous ont dĂ©fini tout cela de manière plus prĂ©cise, mais c’est confidentiel. Â»


2022, c’est dans 7 ans seulement. Est-ce bien rĂ©aliste ? Schoukens n’en doute pas : « Si on peut complĂ©ter ce qu’il se passe Ă  partir de 18 ans, on pourra avoir des rĂ©sultats avec les jeunes qui ont 16 ou 17 ans actuellement. Pour cela, ils doivent devenir plus productifs : il faut professionnaliser dès l’âge de 16 ou 17 ans. Est-ce que cela doit passer par les universitĂ©s ? Sinon, il faut trouver le chemin afin de combler le trou dans le dĂ©veloppement. Quant Ă  l’équipe nationale, ĂŞtre une rĂ©fĂ©rence, ce n’est pas forcĂ©ment devenir champion du monde. Atteindre les demi-finales serait quand mĂŞme dĂ©jĂ  un beau pas en avant. Alors, oui, les deux objectifs, tant celui de la MLS que celui de la FĂ©dĂ©ration, sont rĂ©alistes. Â»