International junior, une garantie d’avenir ?

International junior, une garantie d’avenir ? - Will Johnson et Michael Bradley, aujourd'hui vedettes en MLS, internationaux -20 ans en 2007

Le Coupe du monde des moins de 20 ans vient d’entrer dans sa phase à élimination directe. Quand on assiste à la compétition, on parle souvent des « vedettes de demain ». Mais à quel point est-ce le cas ? Combien de joueurs considérés parmi les meilleurs de leur pays à cet âge font ensuite carrière, et quel genre de carrière ?


Pour le savoir, il n’y a pas 36 000 solutions : il faut éplucher les effectifs présents lors d’une édition précédente et voir ce que sont devenus ces joueurs aujourd’hui. Voilà l’exercice avec quelques équipes présentes au Canada en 2007, composées de joueurs qui doivent donc avoir atteint le sommet de leur carrière aujourd’hui, mais aussi de certains éléments qui s’étaient démarqués lors des éditions 2005 et 2009.


À tout seigneur tout honneur : l’Argentine, championne du monde 2007, était emmenée par Agüero, aujourd’hui à Manchester City, qui était de l’effectif qui s’est rendu en finale de la dernière Coupe du monde en compagnie de Di Maria et du gardien Romero. Huit des dix-huit autres évoluent dans un grand championnat européen (Fazio, Benega, Yacob, Gomez, Moralez, Piatti, Insua et Zarate), et seuls deux d’entre eux n’ont pas beaucoup de temps de jeu. Sigali est titulaire au Dynamo Zagreb. Quatre joueurs sont des éléments importants de leur club en D1 argentine. Trois autres se cherchent dans diverses D1 sud-américaines. Les deux pour qui ça a le plus mal tourné sont le troisième gardien Centeno (aujourd’hui en D3 de son pays) et Matias Sanchez, qui a enchaîné trois clubs mais peu de minutes de jeu depuis son départ de Columbus fin 2013.


Si le bilan d’ensemble n’est pas de 100%, il est globalement positif, mais on parle là de l’équipe qui a remporté le titre mondial, et en plus d’un pays dont le championnat est parmi les meilleurs de sa zone continentale et dont les joueurs ont la cote à l’étranger. Qu’en est-il chez le vice-champion du monde, et pays européen le mieux classé, la Tchéquie ?


Le portrait est soudainement moins emballant. L’arrière central Suchy, qui joue à Bâle, est celui qui semble avoir le mieux réussi. Mazuch, titulaire l’an dernier mais moins utilisé cette saison, est à Dnipro, finaliste de l’Europa League 2015. Gecov tire les marrons du feu au Rapid Bucarest, Janda joue peu en Turquie. Pekhart vient de forcer la promotion en D1 allemande avec Ingolstadt. D’autres ont tenté leur chance dans des divisions inférieures en Europe mais y jouent peu. Ils ne sont que cinq en D1 tchèque. Après, il faut descendre en D2 pour retrouver la trace de certains joueurs présents au Mondial canadien, mais beaucoup d’autres ont disparu de la circulation après un parcours peu glorieux…


Et dans nos contrées, comment ça se passe ? Commençons par les États-Unis. Bradley et Altidore ont connu de belles années à l’étranger avant de revenir en MLS, tous deux à Toronto. Rogers (LA Galaxy), McCarty (New York) et Beltran (Salt Lake) font partie des valeurs sûres du championnat. Même s’ils jouent moins, Zizzo (New York), Sturgis (Houston) et Seitz (Dallas) sont des routiniers de la compétition. Après, c’est le vide. Wallace (New York) et Perk (LA Galaxy) passent le plus clair de leur temps en équipe réserve. Adu, actuellement en Finlande, tente de relancer sa carrière tous les six mois. Akpan n’a jamais percé et se cherche un club depuis que New England l’a laissé partir l’an dernier. Ward a disparu des radars depuis quelques années avant un essai infructueux à New York cet hiver. Szetela joue en NASL, Arguez en PDL. Quant à Igwe, Zimmerman, Ofori Sarkodie (le frère de Kofi), Julian Valentin (le frère de Zarek), Ferrari et Sandbo, leur carrière est terminée sans parfois même avoir commencé.


Vous trouvez ça plutôt moyen ? Attendez de voir ce qu’il en est des Canadiens. L’exception, tout d’abord : Will Johnson, pilier à Portland, un des meilleurs joueurs du pays et très apprécié en MLS. La règle, ensuite : 13 des 21 joueurs présents au Mondial des -20 ans en 2007 ont aujourd’hui disparu des radars du soccer de haut niveau (O’Connor, Beaulieu-Bourgault, Peters, Ayre, Lombardo, Lacoste-Lebuis, Lumley, Nuñez, Elliott, Gala, Owusu-Ansah, D'Agostino et Kalthoff), certains tentant se recycler dans le championnat de leur province. Pour le pays organisateur, qui devait profiter de cette compétition pour lancer une génération vers une brillante carrière, c’est un violent constat d’échec. Cela n’empêche pas Ricketts (Hapoel Haifa, D1 israélienne) de tirer son épingle du jeu, tout comme Jackson et Edgar, tous deux en D2 anglaise, respectivement à Coventry et Huddersfield. Toujours en Angleterre, le cas particulier Begovic, puisque le controversé gardien de Stoke a choisi de défendre les couleurs de la Bosnie. Haber joue à Crewe, en D3 anglaise, Attakora-Gyan à San Antonio, en NASL. Enfin, Monsalve a décidé de voyager en faisant son métier et est aujourd’hui deuxième gardien de l’America Cali (ancien grand club colombien aujourd’hui en D2).


Outre les Argentins Agüero et Moralez, dont nous avons déjà parlé, deux joueurs avaient tapé dans l’œil des observateurs lors du Mondial -20 ans 2007 : l’Espagnol Adrian, aujourd’hui remplaçant à Porto, et le Mexicain Giovani Dos Santos, brillant à Villarreal. Pas besoin de parler de la carrière de celui qui avait terminé meilleur buteur de la compétition deux ans plus tôt, Lionel Messi. L’Argentine s’était également imposée et son capitaine de l’époque, Biglia, porte aujourd’hui les couleurs de la Lazio. L’Espagnol Llorente, monté au jeu pour la Juventus durant la finale de la dernière Ligue des champions européenne, avait également souvent fait trembler les filets en 2005, tout comme l’Ukrainien Aliyev qui a fait une carrière en dents de scie en Russie et semble hors-circuit depuis le début de cette année.


En 2009, le Ghana avait créé la surprise en s’imposant. Son capitaine André Ayew est désormais un pilier tant en équipe nationale A qu’à Marseille. Meilleur buteur du tournoi dont il a été élu meilleur joueur, son compatriote Adiyiah n’a pas connu la même carrière et peine aujourd’hui à trouver le chemin des filets dans le championnat de Thaïlande. Également prolifiques avec les jeunes, le Hongrois Koman est revenu au pays après des passages sans gloire à l’étranger et l’Espagnol Aaron a enchaîné les clubs dans son pays en marquant aussi peu les esprits que de buts. Deux Brésiliens s’étaient aussi illustrés : aucun d’entre eux n’est international aujourd’hui, mais Alex Texiera (Shakhtar Donetsk) et Giuliano (Grêmio après Dnipro) sont des valeurs sûres de leur club. Idem pour le meilleur gardien de la compétition, le Costaricien Alvarado, titulaire à AZ qui joue le haut du classement aux Pays-Bas.


Ce tour d’horizon ne laisse planer aucun doute : si plusieurs futures vedettes disputent la Coupe du monde des moins de 20 ans, de nombreux joueurs prenant part à la compétition sont encore loin du graal, à savoir simplement gagner leur vie grâce au soccer. Presque aucun d’entre eux n’a à ce moment-là la garantie de mener une carrière professionnelle fructueuse. Leurs chances d’y arriver augmenteront grâce à leur talent, mais aussi à de bons choix et à un environnement de soccer propice dans leur pays leur permettant de s’épanouir.